Les nouveaux Ehpad

 

De quoi se composent-ils ?

 

 

La tendance actuelle est, pour des raisons de surfaces et de coûts, de les implanter dans des zones périphériques, ce qui a comme inconvénient de couper les plus valides de la vie sociale de la commune. La nouvelle dépendance exclut néanmoins un grand nombre de résidents des sorties extérieures.

 

L’environnement est très souvent verdoyant, avec de grands jardins ou parcs aménagés. Ils ne garantissent pas les promenades pour autant, mais les permettent.

 

Les nouveaux bâtiments sont souvent de plain-pied (surtout en zone rurale), pour des questions de fonctionnalité. Evitant ainsi escaliers et ascenseurs. Pour les structures de petite capacité, cela est parfait, pour celles dépassant les 80 lits, l’inconvénient est d’étendre les distances. Il faut alors une zone centrale concentrant les lieux de vie, d’où partent les différentes unités (généralement en étoile).

 

Pour humaniser les structures, tout en gardant un nombre de résidents suffisant (80 lits) afin de réaliser une économie d’échelle, elles sont décomposées en unités de 12 à 15 chambres individuelles. Elles sont plus intimes et plus autonomes. Cela permet aussi de les classifier par les différents types de pathologies. Toutes les nouvelles structures comptent aujourd’hui une ou deux unités protégées pour les personnes Alzheimer ou désorientées. A noter que les dernières Unités d ‘Hébergement Renforcé voulues par le gouvernement ont des normes supérieures.

 

Les chambres sont aujourd’hui essentiellement individuelles, même si des chambres doubles sont proposées aux couples. Leur surface varie de 20 m² à 25 m² pour les plus grandes. Elles sont toutes équipées de douche privative, de placards et, pour les plus récentes, de télécommandes au lit, de l’accessibilité des ouvrants et d’un écran plasma. La qualité du mobilier variant selon les établissements.

 

L’aménagement intérieur, qui privilégie aujourd’hui l’intimité, est composé de nombreux salons bien répartis et d’une multitude de lieux de vie potentiels (climatisés). Rares cependant sont ceux les possédant intégralement.

  • Salle de restaurant, bar, salons divers, petite boutique.
  • Salles d’animations, de spectacles, home cinéma, lieu de culte.
  • Salons de coiffure, d’esthétisme, de bien-être, espace Snœzelen (multisensoriel).
  • Jardin thérapeutique, jardin sécurisé, terrasse, cuisine thérapeutique.
  • Balnéothérapie, salles de kinésithérapie ou d’ergothérapie, circuit de déambulation.

 

Au cœur des établissements, ils sont souvent disposés sous forme de place de village ou de rues passantes avec commerces et services. Si l’obligation est faite d’avoir un lieu de vie minimum climatisé, certains les ont tous, et d’autres climatisent aussi les chambres.

 

La décoration intérieure n’est pas une obligation, le confort si, mais il faut reconnaître que de très grands efforts sont réalisés dans les Ehpad pour présenter le meilleur standing possible. Le mobilier est soigné, les couleurs chaudes, les atmosphères travaillées, afin d’apporter aux résidents ce que certains appellent déjà la « bientraitance architecturale ».

 

La recherche de la lumière dans les établissements est aussi essentielle (important pour les personnes désorientées). De grandes baies vitrées font profiter soit de la vie extérieure dans les zones urbaines, soit d’un décor naturel dans les zones rurales, tout en restant protégé.

 

Dernier point, sur lequel les avancées sont significatives mais pas encore généralisées : la domotique. Certes, la signalétique, les rampes de couloir, les couleurs des étages, l’éclairage, les télécommandes du lit, l’accessibilité des ouvrants font partie des normes aujourd’hui, et nombreux sont ceux qui les proposent, cependant, l’automatisation de certaines ouvertures et la généralisation des services sur une seule commande restent à faire.

 

Les derniers établissements s’inscrivent généralement dans une démarche moderne en matière d’éco-conception architecturale, tendant à limiter les impacts d’une construction sur l’environnement. Il respect ainsi les normes Haute Qualité Environnementale.

 

L’inconvénient des normes.

 

Bien entendu, les multiples normes ont de nombreux avantages et ont apporté énormément de positif pour le confort, l’hygiène et la fonctionnalité des structures, aussi bien pour les résidents que pour le personnel. Néanmoins, elles présentent deux inconvénients majeurs :

 

Le premier est de brider bien souvent l’imagination des architectes et la créativité des bâtiments (même si certains diront que cela évite aussi les projets délirants). Rien n’est plus frustrant que de voir un bâtiment neuf sans âme, car, à l’inverse d’une structure vieillissante, lui restera trente ans au minimum.

 

Le second est de générer des coûts d’hébergement toujours plus élevés pour les résidents. A titre d’exemple, une maison de retraite vétuste dont la reconstruction est en cours depuis 2003 est aujourd’hui bloquée par les résidents eux-mêmes. Le prix exorbitant de sa réalisation apporterait une augmentation de 60 % du prix de l’hébergement (de 50 € à 80 €) en deux ans. Autre exemple, celui des Cantou, passés Unités Protégées pour être aujourd’hui Unités d’Hébergement Renforcé avec des obligations toujours plus exigeantes.

 

Aujourd’hui le coût d’un Ehpad neuf se chiffre entre 100.000 € et 150.000 € la chambre, selon qu’il soit urbain, rural, privé ou public. Quel que soit son statut, public, associatif ou privé, entre une structure vétuste de trente ou quarante ans et une structure de la dernière génération, le coût d’hébergement se verra augmenter de 10 à 15 € par jour.

 

Le grand décalage

 

Certaines structures architecturales high-tech, avec un intérieur raffiné à l’extrême et un confort maximal, posent aussi la question du décalage entre le lieu et le résident actuel. Pourquoi un verre à pied sur une double nappe, dans une salle de restaurant digne des plus belles brasseries parisiennes ? Pourquoi de multiples écrans plasma aux murs pour des résidents qui dorment devant ? Pourquoi des parcs ou des jardins immenses alors qu’un très grand nombre ne dépasse pas le seuil de la terrasse ? Pourquoi des espaces bien-être ou balnéo alors que la presque totalité n’a jamais connu un soin corporel de sa vie ? Pourquoi ? Pourquoi ? A ces questions qui divisent même les familles, nous avons pris le parti de les défendre, et voilà pourquoi :

 

Nombreux sont les résidents actuels pour qui le changement d’une résidence vétuste à un nouveau bâtiment n’apporte aucune satisfaction particulière. Premièrement parce que certains sont trop dépendants pour en jouir, deuxièmement parce que d’autres font partie d’une génération qui n’a jamais connu un tel luxe ou confort. Mais les générations futures, plus hédonistes, pour qui sont dressés ces établissements en profiteront davantage.

 

Si, pour les résidents actuels, l’opinion est partagée, le personnel, lui, est gagnant : il voit son cadre et ses conditions de travail changer et facilitées par la fonctionnalité des lieux. C’est plaisant et valorisant à la fois.

 

Dernier point, et non des moindres : un lieu de qualité peut apaiser ou déculpabiliser le sentiment de placement d’un proche par la famille dans un établissement. «Je l’aime, donc je souhaite le meilleur pour lui.»

 

Les lacunes des structures publiques

 

Comme nous l’avons écrit précédemment, l’hébergement a subi, ces dernières années, une évolution très positive, et, quel que soit leur statut, les établissements publics ne dérogent pas à la règle, mais ils nous paraissent présenter deux lacunes essentielles :

 

La première est la grande difficulté qu’ils ont à humaniser leurs bâtiments, alors que ceux-ci disposent généralement de tout, technologie, lieux de vie et normes à leur création. C’est un point qui touche plus les hospitalières que les autonomes, mais il y a bien sûr des exceptions qui montrent que, avec un peu de réflexion et pas forcément plus de moyens, il est possible de réaliser de très beaux projets.

 

Pour exemples, parmi d’autres :

 

EHPAD TY MEM BRO 56580

 

LE HAMEAU DE LA PELOU 33670

 

RESIDENCE PROSPER-MATHIEU 84230

 

RESIDENCE AUGUSTA BESSON 30330, qui est sûrement, à nos yeux, le plus réussi de tous, avec une capacité raisonnable de 50 résidents et la restitution de l’habitat local avec l’esprit de village provençal. Cette résidence est une structure satellite du CENTRE HOSPITALIER DE PONT-SAINT-ESPRIT 30134, qui lui-même est neuf et, malgré la grande qualité de son hébergement et de ses soins, présente en partie la lacune que nous dénonçons.

 

La seconde concerne l’absence dans leur budget annuel d’une ligne de crédit destinée à l’entretien des lieux. On ne parle pas ici des petits soucis dont les hommes d’entretien se chargent. Non, un établissement se détériore très vite avec l’usage, et il est vraiment dommage de voir de superbes réalisations ne recevoir qu’un coup de peinture, cinq ou dix ans après sa livraison.

 

Pour exemple : lors de notre visite, en 2007, de l’Ehpad de Langon, public et de qualité, nous constatons une fuite d’eau au plafond. Deux ans plus tard, nouvelle visite. La fuite est stoppée, mais le plafond n’a toujours pas été remis en place.

 

Nous pourrions vous décrire d’autres exemples, où un simple rail de bois au sol éviterait aux roues des résidents de détruire les murs, où l’on condamne une salle car sa porte ne fonctionne plus, où les jardins ne sont jamais entretenus, etc.

 

 

David Jacquet - Maison de Retraite Sélection, directeur et fondateur.

Bandeau_Dependance.gif